Sondage Pax Medica - Jacques de Toeuf: «Les prestataires de soins décrochent du système!»

Dans la foulée du sondage express réalisé par Le Spécialiste et Medi-Sphere sur la fin de la Pax Medica, qui se profile pour quelque 4 médecins sur 5, le Dr Jacques de Toeuf nous a livré ses réflexions à chaud...

Selon notre sondage, pour 85% des médecins francophones et 76% des médecins néerlandophones, c’est non seulement la fin de la Pax Medica mais aussi une bonne chose pour respectivement 53% et 31% d’entre eux. Qu’en pensez-vous?

Jacques de Toeuf: «La plupart des gens affirment que c’est la fin, même s’ils le déplorent pour certains, l’approuvent pour une majorité d’entre eux. Ces résultats sont logiques, car nous sommes au bout du système médico-mutualiste pour de multiples raisons dont la principale est la montée en puissance des mutualités, un déséquilibre des relations entre partenaires. Les mutualités parlent d’une même voix, alors que du côté médical on est divisé. Qui plus est, les mutualités ont un agenda qui s’exprime dans le pacte des mutuelles conclut avec Maggie De Block. Il vise à assurer, piloter toute la gestion du système d’assurance-maladie et à se substituer à l’état pour pilotage de ce système. Cela se traduit notamment par l’orthodoxie budgétaire. Les médecins, qu’ils soient généralistes ou spécialistes sont les dindons de la farce, non seulement du point de vue financier mais aussi de la possibilité qui leur est laissée d’organiser leur travail. Cela crée un profond malaise  derrière lequel il y a le déséquilibre que j’évoquais.»

A votre avis, faut-il réformer ou adapter le système pour restaurer les équilibres rompus ou faut-il le refondre de façon plus radicale?

Jacques  de Toeuf: «Dans nos pays, il n’y a que deux modèles envisageables. Soit, l’état crée le système et l’on entre dans un système où le financement est assuré au travers de l’impôt et des cotisations sociales et où la discussion – lorsqu’elle existe-, se passe au niveau de l’état et de l’administration. Soit on entre dans un système de type assurantiel, où l’assurance à son mot à dire. Le système belge participe de ces deux modèles, mais on assiste depuis 15 ans à la montée en puissance de l’état. Les dernières péripéties démontrent qu’en réalité c’est l’état qui pilote puisqu’aussi bien l’année passée que cette année, le Conseil Général n’a pas approuvé le budget. En dépit de cette non-approbation, l’état l’a néanmoins validé et appliqué, jusque dans les ventilations et les modalités.

La question aujourd’hui est de savoir si l’on reste sur deux jambes. Car il n’est pas possible d’avoir un système où les partenaires sociaux au sens large ont l’illusion de croire qu’ils participent alors que l’état pilote en sous-main. Il faut clarifier les choses. Manifestement, les prestataires de soins ne s’y retrouvent plus. La preuve en est que l’accord médico-mut est à terre,  que les kinés et les dentistes n’ont pas d’accord, et que les pharmaciens n’en auront sans doute pas davantage. Les prestataires décrochent du système, qui a perdu sa légitimité. Si on veut la reconstruire, il faut faire un choix de départ : soit c’est l’état qui pilote soit c’est la sécurité sociale et les partenaires. Pour moi la condition pour qu’on puisse avoir de nouveau un dialogue et une négociation permanente qui fonctionnent, consiste à rééquilibrer les deux plateaux de la balance. On ne peut continuer un système où une des deux parties n’a finalement plus rien à dire en termes décisionnels, et n’a plus qu’à faire des suggestions polies.»

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