Un séjour hospitalier: satisfait ou remboursé?

L’organisation de services de santé Geisinger (US, Pennsylvanie), qui compte quelque 30.000 employés, 12 hôpitaux et 2 centres de recherche, a lancé en novembre 2015 un plan de remboursement en faveur de ses patients insatisfaits. 100.000 $ ont ainsi été reversés à 100 patients mécontents du service ou des soins, dans les limites du ticket modérateur et de la franchise. (1)

Le pilote ProvenExperience a tout d’abord visé les patients opérés du rachis, mais devrait être étendue à l’ensemble des patients du système Geisinger,  ce qui représente à peu près 3 millions de personnes.

Le Dr Feinberg, CEO de l’organisation réputée pour la qualité de ses soins et son souci d’implication des patients, a défendu la mesure révolutionnaire en soulignant qu’elle manifestait la confiance de l’institution dans ses services et qu’elle constituait un signal fort de la place centrale du patient tout au long du processus de soins et dans les multiples dimensions de celui-ci.

Les plaintes les plus fréquentes ont touché :

  • les délais d’attente, en particulier aux urgences ;
  • le manque de communication avec l’équipe soignante ;
  • le plan de soin ;
  • l’environnement de soin ;
  • la nourriture ;
  • les aspects financiers des soins.

Selon le Dr Feinberg, ce plan  ne devrait pas constituer une grosse dépense d’autant qu’il est rare que les patients  -qui fixent eux-mêmes le montant du remboursement qu’ils souhaitent obtenir- exigent un remboursement total des frais encourus.

Patient experience adjustment

Par ailleurs, le motif d’insatisfaction invoqué n’est pas discuté, expliqué, négocié.  Le principe de base qui sous-tend l’initiative du Dr Feinberg est que, de la même manière que « chez Starbucks, si vous n’aimez pas votre latte, on vous le refait », de la même manière si le patient est insatisfait de son expérience, il est insatisfait. C’est pourquoi, le remboursement apparaît sur la facture patient avec la mention « patient experience adjustment ».

A aucun moment n’intervient l’idée ou le recours à une médiation.

Du service de soins au produit ?

S’il n’y a pas de médiation entre deux pôles, dont le résultat serait une compensation financière, il n’y a pas non plus de culture « no blame ». En effet, dans nombre de cas, les patients désignent nominalement les médecins ou soignants dont ils sont insatisfaits. Ceux-ci, déjà évalués par un système de notation en étoiles (1-5) sont convoqués en vue de discuter des pistes d’amélioration.

Mais quel est le point de vue des soignants sur ce  système de remboursement dont le canevas n’est pas encore entièrement dessiné ?

Si la plupart d’entre eux adhèrent au principe que le but final est la satisfaction des patients, ils s’inquiètent  de la transformation de leur art en pur produit de consommation qu’opère la notion de remboursement  et de la possibilité pour les patients de tirer profit des médecins.  

C’est pourquoi, il conviendrait, souligne le Dr Callahan (Hastings Center) de déterminer strictement quelles sont les plaintes qui traduisent une réelle « menace pour la santé et quelles sont celles qui sont une menace pour la psyché délicate d’une personne » (1). Ce travail devrait être fait par l’équipe de risk management de Geisinger et des représentants de patients.

Il restera encore à s’interroger sur ce que recouvre la satisfaction dans le secteur de la santé et sa traductibilité en espèces sonnantes et trébuchantes. De bons soins, ne sont-ce pas de bons résultats …de santé ?

 
Note :
Voir Alicia Ault,  « Should Patient Get a Moneu-Back Guarantee », in Medscape (25/07/2016), http://www.medscape.com/viewarticle/866556
(1) Ibid.

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