L’accord 2024-2025: que choisir? (Dr J. de Toeuf)

L’accord médicomutualiste 24-25 sera bientôt publié au Moniteur. Il accorde l’indexation des honoraires de 6,05% en 2024 et garantit celle de 2025 (?). De multiples améliorations sélectives y figurent dont le New Deal pour les MG. L’index de 2023 était de 8,14% (-1% réservé pour des initiatives spécifiques). Rappelons que le gouvernement a gelé dans le budget global 250 M € en 23/24, non attribuables; et que notre index est calculé sur la différence entre l’index santé en vigueur en juin de l’année T-1 par rapport à juin T-2 , avec retard donc ce qui explique la crise : les salaires et les coûts de production ont crû plus et plus vite que la compensation par notre index. Les hôpitaux ont reçu plus de deux milliards hors index pour compenser, nous rien.

En 2024, plus encore qu’à l’accoutumée, le médecin devra veiller à l’équilibre financier de sa pratique qui déterminera l’intérêt de signer ou pas l’adhésion à l’accord. Cet accord fut signé par partenaires parce qu’il garantissait l’index. Les difficultés financières en sont un peu amoindries, mais sont toujours  lourdes.

Le généraliste a bénéficié légitimement d’attentions particulières (index complet, DMG en croissance ,New Deal qui finance des frais de personnel -via le budget honoraires de tous les MG- , primes de pratique). Il est victime  par contre de l’explosion des coûts de pratique (personnel, énergie).

Le spécialiste a connu une dégradation plus importante de ses honoraires, réduits par l’exécution des mesures appropriate care, la baisse de volume manifeste dans les années Covid 20-22 et non corrigée, et  dans les hôpitaux, les prélèvements excessifs par les gestionnaires p ex confiscation de la moitié ou de la totalité de la masse d’index.

La valeur des « petites » prestations  (celles inférieures à K120/N200) ne couvre plus les frais de production. Certaines sont effectuées à perte et seul un complément d’honoraire en rétablit la rentabilité. Les consultations ont un honoraire dérisoire. Effectuer certains actes en ambulatoire extrahospitalier devient économiquement impossible. Par contre l’hôpital, à la différence du prestataire ambulatoire,  est subventionné pour couvrir ces frais via le BMF ou des conventions INAMI.

Le revenu net a baissé, chez tous
Deux mesures récentes du gouvernement aggravent la situation. L’interdiction de suppléments pour les patients BIM en ambulatoire touche lourdement les médecins non conventionnés (on parle d’une perte de 200 à 300 M €). Cette mesure entre en vigueur pour partie au 1 janvier 25, et  totalement au ? 1 janvier 2026. L’interdiction de suppléments (depuis décembre 23) pour tous patients pour les RMN/CT Scan prive de recettes indispensables ces services dont les coûts d’exploitation ont flambé et ne sont plus suffisamment couverts par l’honoraire conventionnel et le BMF.

Le standstill des plafonds de suppléments et des rétrocessions (22/23) dans les hôpitaux fut un jeu de dupes : les gestionnaires ne se sont pas privés d’augmenter significativement les rétrocessions.

Quelle attitude adopter?
Un financement correct des médecins demande des ressources nouvelles.  Le gouvernement  s’y refuse. Après avoir réduit les coûts (réduction de personnel, retard des investissements, etc), nous devrons augmenterla prise en charge par les patients en respectant la déontologie.

La réflexion du MG tiendra compte des inadéquations de ses honoraires conventionnels, en valeur propre et par rapport à ceux d’autres professionnels de santé (kinés psy, infirmiers) et de la part des BIM dans ses recettes.

Le spécialiste extrahospitalier a intérêt, pour autant que la part de BIM dans sa patientèle le permette, à refuser son adhésion, ou à tout le moins à se conventionner partiellement. Ce n’est que par une liberté retrouvée d’honoraires qu’il organisera la pérennité de sa pratique.

Le spécialiste hospitalier, conventionné ou non, garde la possibilité de suppléments en chambre à un lit. La question de l’adhésion se pose pour sa pratique ambulatoire en consultation ou polyclinique où sa réflexion est similaire à celle de son collègue extramuros. En outre, compte tenu de l’appétit gargantuesque des gestionnaires pour les honoraires, il est plus qu’urgent de transférer la pratique ambulatoire hors les murs de l’hôpital, p ex dans des pratiques groupées avec actes médicaux et chirurgicaux aujourd’hui faits dans les murs  en policlinique ou en hôpital de jour chirurgical BMF) ou médical (conventions INAMI) dont les frais seront facturés au patient, en attendant une embellie budgétaire (au plus tôt en 2035 ?).

Soyez prudents avant de signer votre adhésion, faites vos calculs de survie économique.

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Derniers commentaires

  • Charles KARIGER

    25 janvier 2024

    La « nouvelle doctoresse », médiocrement rémunérée, privée de plus en plus sottement de l’autorité diagnostique et thérapeutique indispensable à un exercice efficace, devient progressivement le «second revenu» des ménages.
    C’est déjà en marche.
    Nous ne devons pas nous leurrer. Ce ne sont pas que les « gouvernants » qui poussent dans cette direction mais surtout nos populations elles-mêmes , par leurs votes comme au travers de leurs canaux de représentation, TestAchats, mutualités, centres machin-choses, syndicats…