Guérir le sida: c’est aussi un spectacle!

Sur l’initiative du service des maladies infectieuses du CHU St-Pierre (Bruxelles) et avec le soutien de la ville de Bruxelles, une soirée de récolte de fonds à destination de la recherche sur le sida sera organisée le 19 septembre prochain au Cirque Royal.

Il s’agit d’un spectacle de danse contemporaine de Sidi Larbi Cherkaoui et lorsque l’on demande à Stéphane De Wit les raisons du choix d’un tel spectacle, il s’avère qu’il y en a plusieurs. Tout d’abord la salle s’y prête totalement et cette salle a été offerte ainsi que le spectacle par la ville de Bruxelles. «Cela signifie, précise le chercheur, que chaque euro récolté ira à la recherche sur le sida via l’ASBL Association pour la Lutte contre le Sida.» Le spectacle sera présenté en deux parties Memento Mori et Faun et sera interprété par Ballet Vlaanderen. Ces deux spectacles n’ont jamais été présentés à Bruxelles «Cela nous permettra de rassembler des publics divers et toucher tout le monde. Les chorégraphies de Sidi Larbi Cherkaoui demeurent accessibles. Nous avons été aussi influencés dans notre choix par les spectacles Dance for Life que nous avons connu il y a quelques années. C’est la conjonction de différents éléments qui ont guidé notre choix.»

L’objectif des organisateurs est évidemment de recueillir le plus d’argent possible. Il y a différents types de places avec deux prix différents à 65€ pour le premier prix via ticket master puis via le site à 150€ donnant lieu à une déductibilité fiscale de 85€. Enfin une troisième catégorie de places permettant aussi d’assister au diner de gala (350€/pp) est également disponible. Ceci inclut un don de 250€ déductible fiscalement. Enfin, il est également possible de faire un don.

Guérir du sida? Vraiment?

Nous avons rencontré le Pr Stéphane De Wit, chef du Service des Maladies Infectieuses au CHU Saint-Pierre à Bruxelles à propos des directions futures que devraient prendre les traitements contre le VIH.

Aujourd’hui, les médicaments permettent, chez la majorité des patients traités, d’obtenir des charges virales indétectables. «95% de nos patients sont en dessous des 50 voire des 20 copies/mL. Chez certains lorsque nous réalisons des tests poussés, nous n’arrivons même plus à retrouver une seule copie/mL. C’est ainsi que nous pouvons dire que tant que le virus reste indétectable, le patient VIH+ ne peut pas transmettre la maladie à un partenaire», explique le spécialiste. Néanmoins, ce n’est possible qu’au prix d’un traitement quotidien, certes moins lourd que par le passé, mais qui reste indispensable. En effet, en son absence, on voit rapidement augmenter la charge virale après quelques semaines.

«Notre défi, aujourd’hui, est donc de permettre aux patients VIH+ de vivre avec le VIH comme chacun d’entre nous vit avec les autres virus, c’est-à-dire sans qu’un traitement soit nécessaire», poursuit S. De Wit.

Kick&Kill
Pour atteindre cet objectif, les recherches actuelles s’orientent sur le virus et sur son réservoir: c’est l’approche «kick & kill».

«Nous savons que le réservoir du VIH est constitué essentiellement des cellules de la mémoire immunitaire qui peuvent survivre quiescentes pendant des années sans se répliquer. Lorsque le patient est sous traitement, le virus s’il se multiplie est directement détruit. Nous voulons utiliser donc des méthodes afin de réveiller les cellules mémoires infectées et ainsi purger le réservoir viral.» Cette approche est étudiée depuis longtemps et consiste à travailler sur les histones présentes dans l’ADN cellulaire afin de lever les verrous qui font que ces cellules restent quiescentes. «Nous travaillons depuis de nombreuses années à une combinaison permettant d’activer les cellules puis de détruire le virus. Il faut d’ailleurs administrer ces médicaments dans le bon ordre. Nous allons maintenant débuter une étude clinique avec ce type de traitement», précise l’infectiologue.

Promouvoir l’immunité
Une autre approche envisagée par les chercheurs consiste à utiliser les facteurs immunologiques afin de contrôler le mieux possible ce qui restera comme particules virales. «Nous parlons ici des vaccins thérapeutiques que nous attendons toujours, mais où les progrès semblent être patents aujourd’hui. Des recherches s’orientent aussi sur les anticorps neutralisants. Les études sur des modèles animaux sont très encourageantes. Par ailleurs, nous pourrions également utiliser les lymphocytes chimériques, ces fameuses CAR-T cells. L’oncologie nous a appris aussi à utiliser les anti-PD-1 et les antiPD-L1. Nous ne savons pas si l’approche «kick & kill» sera plus efficace que l’approche immunologique, mais il est pratiquement certain qu’aucune des deux ne suffira à elle seule», précise Stéphane De Wit. Il est possible qu’il faille aussi agir sur des co-activations comme l’infection au CMV par exemple.

Ne pas négliger les autres pistes
«A côté de cela, il existe aussi d’autres leviers comme l’activation immune persistante à cause du passage des lipopolysaccharides bactériens à travers la barrière digestive qui maintiennent cette stimulation anormale permanente, caractéristique chez le patient VIH+.» C’est pour cette raison que beaucoup de recherches s’orientent aussi sur le microbiote. «Il faut se rappeler que le système immunitaire digestif constitue notre plus grande réserve en CD4 et que celle-ci est détruite très vite au début de l’infection sans pouvoir vraiment se reconstituer.»

Enfin, afin de combattre efficacement le VIH, il faut pouvoir le dépister très rapidement après la contamination. «En effet, les chances de rémission lorsque le patient est déjà infecté depuis plusieurs années avec un taux bas de CD4 sont vraiment faibles.» En Belgique, environ 35% des personnes dépistées actuellement le sont tardivement. Le traitement rapide après le dépistage est le corolaire logique.

Guérir du sida, dans le sens où cela permettra aux patients VIH+ de pouvoir vivre sans recourir à une médication permanente, n’est pas encore pour tout de suite, mais les voies sont tracées. Pour qu’elles aboutissent à une solution, la recherche fondamentale et appliquée a besoin de fonds…

 

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