Innovations eHealth: être ou ne pas être remboursées

Applications de monitoring santé, plateformes et dispositifs de télémédecine, dispositifs médicaux digitaux… les innovations en santé digitale explosent. L’un des principaux défis pour les startups qui développent ces nouveaux outils est d’accéder au marché et d’obtenir un remboursement. Pour éclairer les acteurs,  Jo De Cock, l’administrateur général de l’Inami, a été invité à présenter sa vision et les évolutions futures en matière de remboursement devant un panel d’entrepreneurs.​

En dépit du plan e-santé et de la volonté affirmée du gouvernement à soutenir le déploiement de la santé digitale, force est de constater que les modalités de remboursement demeurent floues. Lifetech brussels, MIC Vlaanderen, MIC Brussels et le Caring Entrepreneurship Fund ont donc invité Jo De Cock, l’administrateur général de l’INAMI, à présenter sa vision de l’innovation et à éclairer le public d’entrepreneurs présent quant aux démarches à accomplir.

eHealth et modalités classiques de remboursement

Dans cette perspective, Jo De Cock a tout d’abord rappelé que si l’innovation est indispensable à tout système de soins de santé, cela ne saurait signifier que toute innovation sera de facto remboursée. Pour obtenir un éventuel remboursement, dispositifs et applications devront faire la preuve de leur réelle valeur ajoutée et s’inscrire dans le processus d’intégration des soins que vise la réforme en cours du système de santé.

Actuellement,  le remboursement s’opère différemment selon qu’il s’agit de nouveaux services ou de nouveaux produits:

  • les services ne peuvent être remboursés qu’à partir des centres de soins, et à la condition d’être inclus dans les actes de la nomenclature médicale;

  • le remboursement des produits nécessite en revanche l’introduction d’un dossier auprès de l’Inami qui en évaluera la pertinence. Si la procédure actuelle est essentiellement adaptée aux médicaments, une procédure plus adéquate aux spécificités des dispositifs médicaux devrait voir le jour dans les prochaines années.

Vers une médecine basée sur la valeur

De manière générale, le remboursement des nouveaux produits et services devrait évoluer dans les prochaines années en direction d’une médecine value based, axée sur les résultats de soins et sur les paiements groupés c’est–à-dire un forfait par patient (qui pourrait même, à l’avenir, être versé au patient) destiné à couvrir tous les aspects du traitement d’une maladie : actes, médicaments, dispositifs, e-santé. Ces nouvelles modalités de remboursement seront notamment testées via les projets pilotes, avec pour objectif de conjoindre 4 exigences: a) les plus hauts standards de soins, b) l’impact économique,  c) l’impact social et  d) les contraintes de politiques publiques.

En définitive, trois questions devraient permettre d’évaluer une innovation et la pertinence de son remboursement:

  • 1. Quel est l’impact de cette innovation en comparaison avec les traitements actuels?

  • 2. Quelles sont les conséquences de cette innovation aux plans social, de la santé et économique?

  • 3. Quels sont les changements qui doivent être pris en considération?

Si aucune réponse claire ne peut y être apportée, ou si aucune amélioration notable ne peut être dégagée, il y a peu de chance que l’innovation soit remboursée sauf si elle répond à un besoin médical non rencontré.

Quelques questions des acteurs de terrain

Dans la suite du débat, Jo De Cock a été confronté aux interrogations de différents industriels. Ainsi Thibault Helleputte (CEO, DNAlytics) a indiqué qu’outre des procédures de remboursement claires et adaptées aux diagnostics in vitro (prévues en 2019), l’accès aux bases de données de santé faciliterait grandement le développement de nouveaux produits façonnés pour répondre plus efficacement aux besoins. Selon Jo De Cock l’open data est une réelle priorité des autorités, mais les modalités d’ouverture et de partage des données n’ont pas encore été déterminées.

Jo van der Auwera (Qompium, Fibricheck) a quant à lui soulevé la question du remboursement d’une application de monitoring à distance du rythme cardiaque de patients qui ont eu un accident vasculaire cérébral, alors même que rien n’est prévu dans la nomenclature à ce sujet. Dans ce cas, a indiqué Jo de Cock, il convient d’administrer la preuve que cette nouvelle technologie offre un résultat meilleur ou au moins équivalent aux technologies «nomenclaturées». Les 92 projets pilotes rentrés dans l’appel à projets «Mobile Health» devraient permettre d’avancer des solutions pour répondre à ce type de problème.

Bastien Ritzen de Zebra Academy, a fait part d’une difficulté similaire dans la mesure où il n’existe actuellement aucun cadre légal susceptible d’encadrer les solutions de téléradiologie et de téléconsultation qui sont au cœur de la solution développée par la jeune société qui propose le diagnostic précoce de l’AVC durant le trajet en ambulance. Pour Jo De Cock, une solution de court terme pourrait être trouvée via le service d’urgence relié, mais pour le long terme, la question de l’équivalence de la téléconsultation est en cours, et doit être tranchée par les experts.

Si le cadre global de gouvernance et de remboursement est désormais fixé, les modalités et procédures de remboursement doivent encore être façonnées pour répondre aux différentes spécificités de l’esanté. A l’innovation industrielle, doit encore répondre l’innovation procédurale.

Pour plus d'information, voir: http://lifetechbrussels.com/to-be-or-not-to-be-reimbursed/

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