Qualité de l'air à Bruxelles - Cri d'alarme des médecins, sur une "crise de santé silencieuse et inacceptable"

Les quotidiens Le Soir et De Standaard publient lundi une lettre ouverte, transmise par "une centaine" de médecins de Belgique, qui souhaitent "tirer la sonnette d'alarme" auprès des autorités fédérales et régionales bruxelloises au sujet de la pollution atmosphérique. "Malgré l'obligation des autorités de garantir un air plus sain depuis 2010, la population vit dans un air dangereux et malsain", préviennent les scientifiques.

"La pollution de l'air nuit gravement à la santé des Bruxellois et des navetteurs, et particulièrement à celle des enfants, des personnes âgées et des personnes déjà atteintes d'une maladie", ajoute le texte, qui précise que, de nos jours, "même les non-fumeurs courent le risque de mourir d'un cancer du poumon". Du risque cardiovasculaire à l'asthme en passant par des troubles cognitifs: les effets de la pollution de l'air sont liés en Belgique à "une réduction importante de l'espérance de vie qui se traduit annuellement par au moins 632 décès prématurés".

"Ceci pourrait être évité si Bruxelles appliquait les normes de l'OMS et respectait les taux de concentration moyenne de particules fines de 20 microg/m³", assènent les auteurs. "Le gain d'espérance de vie se traduirait par une économie d'un montant impressionnant de plus de 758 millions d'euros par an".

"Dans le cas de la pollution de l'air, la recherche scientifique ne laisse pas d'ambiguïté sur les causes que nous devons viser pour protéger les citoyens", et la résolution de ce problème "incombe à notre gouvernement et à nos ministres". "Un air sain est d'ailleurs un droit fondamental et universel", souligne la lettre ouverte, qui évoque une "crise de santé silencieuse et inacceptable". Les médecins pointent une politique insuffisante, notamment dans le cadre du Plan Air-Climat-Énergie mis sur pied par le gouvernement bruxellois en 2016, qui "ne satisfait pas (...) aux exigences de la directive européenne en matière de qualité de l'air (directive 2008/50/CE)".

En cause, principalement: l'usage abusif dans la capitale de véhicules diesel, pour lesquels les auteurs réclament notamment une obligation d'usage de filtre à suie jusqu'à une interdiction complète. 

À ce propos, la ministre bruxelloise de l'Environnement Céline Fremault défend la récente mesure adoptée qui impose une zone de basses émissions de polluants atmosphériques à partir du 1er janvier prochain. Cette disposition bannira de l'ensemble de la Région bruxelloise les véhicules diesel les plus anciens et, donc, les plus polluants. "Cette décision est un véritable changement de paradigme", assure la ministre dans Le Soir, qualifiant l'instauration de cette zone de "premier pas dans la bonne direction".

Toutefois, Mme Fremault reconnaît que celui-ci est "insuffissant" et insiste sur le rôle du gouvernement fédéral pour instaurer des politiques environnementales efficaces. "Réduire le problème de la pollution atmosphérique à des décisions bruxelloises plus ambitieuses n'est pas exact", se défend-elle.

Un argument qui ne convainc cependant pas totalement le Groupe de Recherche et d'Action des Cyclistes Quotidiens (Gracq). Dans une réaction à la lettre ouverte des médecins, celui-ci pointe le manque d'ambition des gouvernements dans la lutte contre la mauvaise qualité de l'air. Prenant l'exemple du nouveau projet de réaménagement de l'avenue du Port, il déplore la place prépondérante que garde la voiture dans l'aménagement du territoire.

"Dans la nouvelle mouture du projet, les pistes cyclables ont été réduites, le trottoir a été rétréci, la bande bus a été supprimée, du parking a été ajouté entre les arbres et la voiture dispose désormais de plus d'espace en voirie", regrette l'association citoyenne. "Tant que l'on considérera la voiture comme le point de départ de toute politique de mobilité, on peut difficilement initier un véritable report modal (le remplacement d'un mode de transport saturé par un autre pour décongestionner le premier, à l'échelle régionale", conclut-elle.

Le Gracq rejoint ainsi la centaine de médecins qui plaide pour une amélioration de l'offre en matière de mobilité "propre" et pour le découragement fiscal de la mobilité fossile.

> Découvrir la lettre ouverte

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