«Grossesse RAS»: point besoin de multiplier les examens (KCE)

Porter un enfant et le mettre au monde sont des choses hautement naturelles. Autant ne pas transformer l’expérience en une aventure médicalisée à outrance… Tel est, en substance, le message qui domine dans le récent rapport du KCE sur le suivi des grossesses à bas risque. Le document consiste en une actualisation de recommandations cliniques qui avaient 10 ans.

 

D’entrée de jeu, le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE) déclare emboîter le pas, avec ses bonnes pratiques revisitées, à l’OMS. Celle-ci préconise explicitement de dé-médicaliser les grossesses se déroulant normalement, sans risque particulier identifié. Ce qui, concède-t-il, rame à contre-courant de la tendance sociétale à la (sur)médicalisation, de par la disponibilité croissante de technologies de détection des anomalies («sans qu’il y ait pour autant toujours une solution adéquate à proposer», observe le KCE).

A faire… parfois

Le KCE a confirmé les recommandations formulées en 2004, sur la fréquence des consultations prénatales (idéalement dix pour les primipares, sept chez les multipares) par exemple, et sur une série d’examens dont les bénéfices restent bien établis: surveillance du poids, de la tension artérielle, examen des urines, écoute du cœur du bébé, dépistage du diabète, etc. Le KCE pose ou revoit certains jalons en matière d’infections à rechercher. Exemples? Pour lui, on ne dispose pas de preuves suffisantes pour recommander un dosage sérologique des anticorps contre le cytomégalovirus chez toutes les femmes enceintes ou pour répéter en routine un dosage des anticorps contre la toxoplasmose à différents stades de la gestation. En revanche, un examen sérologique unique avant ou au tout début de la grossesse peut s’avérer utile dès lors qu’il va inciter les futures mères non immunisées à adopter des mesures préventives appropriées.

Le KCE estime encore, par exemple, que les bénéfices d’un dépistage systématique de la déficience en vitamine D n’étant pas établis, celui-ci ne peut être recommandé, pas plus qu’une supplémentation en dehors des populations à risque de carence sévère. Autre illustration: on ne dispose d’aucune preuve pour conseiller des examens complémentaires (en sus de l’évaluation de routine basée sur l’anamnèse et l’examen clinique) pour détecter un risque de pré-éclampsie chez les femmes à bas risque.

Le KCE estime par ailleurs à deux le nombre d’échographies nécessaires (en début de grossesse et au milieu), sans être fermé à un troisième examen («l’échographie du 3e trimestre n’est pas absolument nécessaire», écrit-il, «mais elle apporte certaines informations, elle ne présente pas d’inconvénient médical majeur et… elle est extrêmement attendue par les futurs parents»).

Impensable de passer à côté

Le KCE admet qu’aujourd’hui, il est impensable pour les parents, et de nombreux professionnels, de «passer à côté» d’un problème qu’on aurait éventuellement pu déceler. Sa position reste néanmoins de déconseiller tout dépistage dont les bénéfices pour la mère et l’enfant à naître ne seraient pas «nettement supérieurs à ses désavantages». La raison principale en est, dit-il, que de nombreux examens de dépistage ne sont pas à 100% précis, qu’il y aura de nombreux faux positifs, qu’on aura induit des angoisses chez nombre de femmes, et mis en oeuvre des examens complémentaires, voire des traitements, pas toujours anodins. Et d’illustrer par le cas de la détection d’une infection intra-utérine par le CMV via amniocentèse, avec risques connus de fausse couche, alors qu’il restera impossible, d’après lui, d’établir avec certitude si le bébé est atteint et risque des séquelles.

«Nous touchons là à un domaine éthique très sensible où, à côté du droit de savoir, celui de ne pas savoir doit aussi pouvoir être invoqué», indique le KCE dans son rapport, en plaidant pour qu’on donne aux parents «toute l’information nécessaire pour qu’ils puissent prendre les décisions qu’ils estiment justes».

Centralisation de l’information

Le guide de suivi des grossesses à bas risque est disponible en ligne sur le site du KCE, en version intégrale (125 pages en anglais) ou synthétique (42 pages en français). A noter: le KCE s’emploie à aider les (médecins) visiteurs à s’orienter dans ses collections qui ne cessent de s’enrichir. Il a créé des pages «focus» d’où on peut «rayonner» vers les contenus tournant autour d’une même thématique. En l’occurrence, il a regroupé des liens conduisant à une bonne douzaine de documents axés sur la grossesse, l’accouchement et les soins postnataux.

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