L’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) a publié une nouvelle étude mettant en évidence des inégalités préoccupantes dans l’accès à la médecine générale en Wallonie. Certaines zones cumulent pénurie de médecins, éloignement des cabinets et accès difficile aux urgences, sans que des solutions concrètes ne soient encore mises en place.
Une étude de l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) met en lumière des inégalités importantes dans l’accès à la médecine générale en Wallonie francophone. Sur base des données du cadastre des médecins généralistes de l’AVIQ au 31 décembre 2023, l’analyse révèle qu’une part importante de la population vit dans des zones sous-dotées en médecins généralistes, malgré des moyennes régionales apparemment satisfaisantes.
Près de la moitié des habitants concernés par la sous-offre
Selon l’indicateur d’accessibilité potentielle localisée (APL), 47,6 % de la population wallonne francophone réside dans des zones comptant moins de 90 équivalents temps plein (ETP) pour 100 000 habitants. Plus préoccupant encore : 4,8 % des habitants (soit environ 174 600 personnes) vivent dans des territoires en sous-offre prononcée, avec moins de 50 ETP pour 100 000 habitants. Ces zones se concentrent notamment en province de Luxembourg, entre Houffalize et Neufchâteau, dans la périphérie d’Arlon, ou encore à l’est de Houyet, à Stoumont et à Waimes.
Des distances qui aggravent les inégalités
En moyenne, 93,1 % de la population vit à moins de 3 km d’un cabinet et 98,2 % à moins de 5 km. Mais ces chiffres masquent de fortes disparités : plus de 64 000 personnes vivent à plus de 5 km d’un cabinet, et 139 179 habitants sont à plus de 5 minutes en voiture du médecin le plus proche, dont 37 % en province de Luxembourg et 22 % en province de Namur.
Des communes en déficit alarmant
Certaines communes affichent des ratios particulièrement bas, bien en dessous des seuils de pénurie sévère fixés par la législation : Rouvroy (32,4 ETP/100 000 habitants), Hélécine (39,1), Chiny (39,3), Martelange (40,1), Vaux-sur-Sûre (41,5), Houffalize (41,6), Daverdisse (42,5) et Bertogne (42,9). Au total, 86 communes sont officiellement reconnues en pénurie et 62 en pénurie sévère, la province de Luxembourg concentrant 41 des 44 communes touchées.
Une organisation éclatée et des pratiques contrastées
Selon l’étude de l’IWEPS, 51 % des médecins généralistes wallons exercent dans une pratique de groupe, un chiffre qui atteint 71 % chez les moins de 35 ans et seulement 24 % chez les 65 ans et plus. Pourtant, lorsque l’on observe l’organisation des cabinets, 73 % des 2 564 cabinets identifiés n’accueillent qu’un seul médecin. Cette apparente contradiction s’explique par le fait qu’un même médecin peut exercer seul dans un cabinet tout en appartenant à une structure de groupe via un autre cabinet. L’étude précise d’ailleurs que 120 médecins travaillent dans deux cabinets différents et un seul médecin dans trois cabinets.. Le rapport souligne également que 20 % des médecins wallons refusaient déjà de nouveaux patients en 2022. Enfin, la durée moyenne d’une consultation atteint 23 minutes, un chiffre qui, conjugué à la pénurie, pose la question de la soutenabilité des charges de travail.
Un accès aux urgences loin d’être universel
L’étude souligne aussi que 94,3 % des habitants sont à moins de 20 minutes d’un service d’urgence ou d’un SMUR. Mais ce chiffre laisse encore plus de 200 000 habitants au-delà de ce seuil, souvent dans les mêmes zones rurales où l’offre de médecine générale fait défaut. « Cet éloignement des services d’urgence combiné à la pénurie de généralistes renforce les difficultés d’accès aux soins », souligne l’IWEPS.
Un appel à repenser la répartition de l’offre
Les auteurs insistent sur la nécessité de mieux articuler la répartition des médecins avec les centralités et le réseau structurant des transports collectifs, comme le préconise le Schéma de développement du territoire. L’enjeu : éviter que ces chiffres alarmants ne traduisent demain un véritable abandon de certaines zones rurales.
> Découvrir l'intégralité de l'étude
> Cadastre des médecins généralistes actifs en Wallonie (période 2016-2023)
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Charles KARIGER
04 juillet 2025Alphonse Allais, célèbre humoriste du XIXe siècle, aurait dit un jour : "Les villes devraient être construites à la campagne, l'air y est tellement plus pur"
L'IWEPS arrive à la conclusion inverse: il faudrait installer nos campagnes en ville pour qu'elles bénéficient de tous les avantages de la ville.
Mais rassurons-nous, grâce aux Zécocolos tout s'équilibre. En ville, dans les "quartiers à circulation dite apaisée", les déplacements sont déjà aussi longs qu'à Daverdisse.