Soins standardisés à basse variabilité: «C’est l’enfer!» ( Dr Ph.Devos)

Le Dr Philippe Devos, président du Conseil médical du CHC, craint l’affrontement des médecins et les recours sur le partage des honoraires. «Comme médecin, on a vraiment l’impression que ce sont des grands théoriciens qui ont mis en place cette réforme sans jamais avoir vu un malade.»
L’introduction de la prise en charge standardisée des soins à basse variabilité ne se déroulera pas sans heurts. Des problèmes juridiques, financiers et administratifs sont soulevés par différents intervenants, sans parler du processus informatique qui est très en retard. Le Dr Ph. Devos, président du Conseil médical du CHC, tire la sonnette d’alarme: «Avec cette réforme, je pensais sincèrement que le but du gouvernement était d’aider les gens. Mais c’est juste le chaos».

Le pot commun pour les médecins: c’est l’enfer
Pour lui, l’un des problèmes principaux se situe au niveau informatique: «90% des hôpitaux n’ont pas un programme informatique pour répondre convenablement aux nouvelles demandes pour scinder les salaires des médecins en fonction des interventions comme l’a proposé Jo De Cock. Le matériel informatique n’est absolument pas adapté pour permettre une séparation des honoraires le plus justement possible pour chaque médecin».

Ces énormes difficultés ont un impact sur la gestion des hôpitaux: «Aujourd’hui, les directeurs financiers ne veulent pas effectuer cela manuellement et les sociétés informatiques ne veulent pas développer une application adaptée parce qu’elles s’inquiètent de la complexité du système qui devrait être mis en place».

D’autres difficultés s’ajoutent selon lui: «Les associations Unessa et Santhéa n’arrivent pas à se mettre d’accord pour avoir une division commune pour cette réforme et cela décourage les sociétés informatiques».

Mauvaise gestion
Pour lui, aujourd’hui, on nage en plein «amateurisme». «Je comprends la logique du forfait mais elle va dégouter tout le monde. Rien n’a été mis en place pour réunir les médecins sur cette question. On va à l’affrontement à cause de la mauvaise gestion des changements en cours par les autorités compétentes. Comme médecin, on a vraiment l’impression que ce sont des grands théoriciens qui ont mis en place cette réforme sans jamais avoir vu un malade

Il donne un exemple: «Pour une colonoscopie, suivant l’âge, si c’est un ado ou un adulte à qui va-t-on donner le forfait? Le pédiatre sera donc aussi concerné sans oublier évidemment le gastroentérologue...»

Recours
Il va plus loin: «Aujourd’hui, j’ai une vraie crainte au niveau des recours sur le partage des honoraires et de voir apparaître un climat de guerre entre les médecins. Ce n’est bon ni pour les soins de santé ni pour la sérénité dans un hôpital. On ne pourra pas empêcher certains médecins de penser qu’ils ne reçoivent pas leur juste dû dans la décomposition des honoraires surtout que la circulaire n’est pas assez claire selon les avis juridiques actuellement consultés».

Mise en réseau: message politique wallon nul
Dans ce chaos, la gestion régionale de la mise en réseaux ne le rassure pas non plus: «Le ministre flamand a pris position pour les groupements et les réseaux. Toutefois, du côté wallon, le message politique est nul. La ministre Greoli avait l’intention de réunir les fédérations. Elle les a réunies mais rien ne bouge. J’espère que le Gouvernement wallon ne va pas tergiverser jusqu’aux prochaines élections en espérant que le Fédéral change sa position. Ce serait une erreur».
En ce début d’années, les tensions ne manquent donc pas au niveau hospitalier.

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Derniers commentaires

  • Benoit Collin

    31 janvier 2019

    La repartition des honoraires inclus dans le montant global prospectif par admission se fait comme pour tout honoraire sur base de la ou des spécialités autorisées à prester l'acte compris dans le montant global. C'est tout ce que precise la repartition fournie par l'INAMI afin qu'on attribute pas un honoraire à une spécialité qui ne peut prester l'acte en question.
    Il faut indiquer que c'est une demande expresse des syndicats médicaux et particuliérement des représentants de l'ABSYM lors de la preparation de la réforme afin d'éviter justement une guerre entre medecins pour s'attribuer les honoraires qui ne leur reviennent pas. Par exemple que l'on decide au niveau de l'hopital et du conseil médical que les honoraires du chirurgien sont attribués à l'anesthésiste ou le contraire. Par contre cela n'empêche pas que les chirurgiens ou les anesthésistes ou tout autre spécialité décident ce qu'il font des honoraires qui leur reviennent (mise en commun dans un pool, retrocession à l'hopital, fonds de solidarité, etc....
    Donc je m'étonne toujours d'entendre que des théoriciens sans connaissance des malades auraient decide seuls sans aucune concertation ni conseils des praticiens de terrain ! C'est mal connaître le modèle de concertation à la Belge et l'implication des représentants notamment du corps medical et des associations notamment de médecins dont celle à laquelle vous appartenez !