Un généraliste demande l’acquittement pour avoir prescrit trop de somnifères

Un médecin généraliste d’Eeklo (Flandre orientale) conteste devant la cour d’appel qu’il ait prescrit trop de pilules à une patiente dépendante, qui s’est suicidée il y a cinq ans. Selon son avocate, il assurait au contraire un suivi très étroit.

L’affaire a débuté le 16 janvier 2020, lorsqu’un homme a déposé plainte contre le généraliste. Sa sœur s’était donné la mort le 31 décembre 2019 à son domicile. Elle était dépendante à l’alcool et aux médicaments depuis plusieurs années, avec une consommation devenue problématique au cours des huit dernières années. Par l’intermédiaire de l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS), toutes les pharmacies d’Eeklo, Kaprijke et Lievegem ont été interrogées. Il est apparu qu’entre le 1er janvier et le 31 décembre 2019, dix officines ont délivré 91 prescriptions au nom de la victime pour des antidépresseurs, des somnifères et des antalgiques, toutes établies par le même généraliste. Selon des témoins, le médecin glissait parfois des prescriptions, voire des pilules, dans la boîte aux lettres de la patiente ou les lui apportait à domicile. Des données téléphoniques et des témoignages indiquent aussi une relation dépassant les limites d’un cadre thérapeutique normal.

En première instance, le médecin a été condamné à deux ans de prison avec sursis et radié de l’Ordre des médecins à vie. Il a interjeté appel. Son avocate affirme qu’il suivait précisément la patiente de près, « il la voyait chaque semaine, voire davantage, cinq fois par mois ».

Elle soutient par ailleurs qu’il n’est pas établi que les 91 prescriptions concernaient toutes des somnifères ou des antidépresseurs, « elles ne figurent pas au dossier, je ne peux donc pas vérifier ». Elle invoque le casier judiciaire vierge du médecin et sa carrière irréprochable, et demande l’acquittement.

Le procureur général requiert la confirmation de la peine, « son mobile était la passion amoureuse. Il a prêté serment et doit placer l’intérêt du patient avant le sien ».

L’avocat ne nourrit aucun doute, sauf sur le nombre de prescriptions, « il y en a au moins 91, puisque seules les pharmacies d’Eeklo, Lievegem et Kaprijke ont été interrogées, pas celles de Maldegem ou d’Adegem ». Il attribue ce comportement de prescription aux sentiments éprouvés, « il a continué à prescrire en sachant que la combinaison avec l’alcool était dangereuse. Il voulait maintenir leur lien affectif et ne pas la perdre comme patiente. Il a annulé les efforts de la famille, y compris le refus d’une mise en observation. Il porte une responsabilité écrasante dans sa spirale descendante ».

Le médecin nie toute faute, « elle était dans une situation financière catastrophique et je lui ai effectivement prêté de l’argent, mais pas contre des relations sexuelles. Et parmi ces 91 prescriptions figuraient aussi une pommade et des médicaments pour ses problèmes gastriques et thyroïdiens. Ce n’étaient certainement pas tous des somnifères ».

La décision est attendue le 9 décembre.

Vous souhaitez commenter cet article ?

L'accès à la totalité des fonctionnalités est réservé aux professionnels de la santé.

Si vous êtes un professionnel de la santé vous devez vous connecter ou vous inscrire gratuitement sur notre site pour accéder à la totalité de notre contenu.
Si vous êtes journaliste ou si vous souhaitez nous informer écrivez-nous à redaction@rmnet.be.