VIH: les statines en prévention primaire font leur entrée dans les recommandations anglaises

La British HIV Association (BHIVA) recommande à toute personne vivant avec le VIH âgée de 40 ans et plus de prendre une statine afin de réduire son risque cardiovasculaire même si elle ne présente ni hypercholestérolémie, ni risque élevé de maladies cardiovasculaires. Ces nouvelles lignes directrices sont les premières au monde à répondre aux résultats de l’étude REPRIEVE présentés lors du congrès 2023 de l’IAS à Brisbane.

REPRIEVE a ouvert la voie de la prévention cardiovasculaire primaire
Pour rappel, l’étude REPRIEVE avait pour but de tester si une statine, administrée en prévention primaire, réduisait le risque cardiovasculaire chez les personnes vivant avec le VIH. Vivre avec le VIH augmente le risque de maladie cardiaque, quels que soient les autres facteurs de risque présents tels que le tabagisme, l'hypercholestérolémie ou l'hypertension artérielle. Alors que les personnes vivant avec le VIH sont deux fois plus susceptibles de développer une maladie cardiovasculaire, les calculateurs de risque utilisés pour évaluer le risque cardiovasculaire dans la population générale peuvent sous-estimer le risque de maladie pour les personnes séropositives. REPRIVE a montré que la prise quotidienne d’une statine particulière, la pitavastatine, choisie pour son faible pouvoir d’interactions avec les antirétroviraux, réduisait de 35% le risque d'un événement cardiovasculaire majeur tel que crise cardiaque, AVC, AIT, angor instable, maladie vasculaire périphérique ou procédure de revascularisation chez les personnes séropositives présentant un risque faible à modéré de maladie cardiovasculaire grave sur une période de dix ans.

Recommandations du BHIVA
La BHIVA recommande que les personnes séropositives âgées de 40 ans et plus se voient proposer une statine et ce, quel que soit leur taux de lipides ou leur risque cardiovasculaire estimé. De plus, les personnes séropositives âgées de 40 ans et plus présentant un risque estimé à 5% ou plus sur 10 ans devraient bénéficier, en priorité, d'un traitement par statines. Le premier choix pour le traitement par statines chez les personnes vivant avec le VIH devrait être la pitavastatine à raison de 4mg par jour. L’atorvastatine 20mg par jour peut être utilisée comme alternative. Pour les personnes qui ne tolèrent pas une statine, il est proposé de prescrire de l'ézétimibe.

Le généraliste au cœur de la prévention cardiovasculaire
Les recommandations de la BHIVA placent le médecin généraliste au cœur du processus de prévention cardiovasculaire chez les personnes vivant avec le VIH en leur confiant la prescription de statines. Il sera donc important que les centres de référence VIH leur communiquent les raisons justifiant la prescription de statines. Dans cette optique, la BHIVA a élaboré une déclaration à inclure dans les lettres adressées aux médecins généralistes leur demandant de prescrire des statines aux patients infectés par le VIH et décrivant en quoi la recommandation est conforme aux lignes directrices du NICE sur la prescription de statines. En plus de recommander l'utilisation des statines, les cliniques VIH et les médecins généralistes devront également fournir des conseils d’hygiène de vie concernant la cessation tabagique, l'exercice physique, l'alimentation équilibrée, la gestion du poids et la consommation d'alcool, ceci afin de lutter contre d'autres facteurs de risque cardiovasculaire.

Quelques conseils très pratiques
Bien que la pitavastatine et l'atorvastatine présentent un faible risque d'interactions médicamenteuses avec les antirétroviraux, un certain nombre de précautions doivent cependant être prises lorsqu'un traitement par statines est initié chez des personnes séropositives:

  • Pour les personnes prenant de l'atazanavir ou de l'atazanavir ritonavir, il est conseillé de débuter la pitavastatine à la dose la plus faible et d’en augmenter progressivement la dose en raison du risque d'augmentation des taux de pitavastatine. La BHIVA indique aussi que l’atazanavir boosté doit être évité autant que possible lors de l’utilisation de l’atorvastatine.
  • Pour les personnes prenant du darunavir ou de l'elvitégravir boosté par du ritonavir ou du cobicistat, il est conseillé d’initier l'atorvastatine à la dose la plus faible possible et surveillez attentivement les augmentations de dose jusqu'à 40mg maximum.
  • Pour les personnes prenant de l'éfavirenz et de l'atorvastatine, une augmentation de la dose d'atorvastatine peut s’avérer nécessaire en fonction de la réponse lipidique au traitement.

Enfin, il est également recommandé d’évaluer le traitement antirétroviral afin de vérifier s’il convient bien aux personnes présentant un risque cardiovasculaire élevé. Il est ainsi recommandé d'éviter l'abacavir et le lopinavir/ritonavir chez les personnes présentant un risque cardiovasculaire élevé. Pour ce groupe de patients, mieux vaut se tourner vers l’atazanavir/ritonavir.

  • Communiqué de la BHIVA publié sur son site, novembre 2023.

Vous souhaitez commenter cet article ?

L'accès à la totalité des fonctionnalités est réservé aux professionnels de la santé.

Si vous êtes un professionnel de la santé vous devez vous connecter ou vous inscrire gratuitement sur notre site pour accéder à la totalité de notre contenu.
Si vous êtes journaliste ou si vous souhaitez nous informer écrivez-nous à redaction@rmnet.be.