Depuis des années, les soins intensifs se surpassent chaque jour dans un contexte hospitalier parfois compliqué. Au fil du temps, l’évolution de l’informatique, la mise en place du dossier patient et du système d’information hospitalier (SIH) se sont développés. Ces derniers doivent aider le personnel soignant (sans augmenter la charge de travail) et améliorer la qualité des soins. Retour d’expérience sur une évolution qui a commencé dans les années 80 en Belgique.
Suite à la naissance des unités coronaires (UC) dans le monde et à la nécessité d’analyser en continu les signaux cardiovasculaires, les développements informatiques et ceux des UC furent étroitement liés. La thèse du Professeur Jacques Col en 1987, sur l’évolution hémodynamique après un infarctus aigu du myocarde, a contribué aux développements de l’unité coronaire intensive. Elle aura également mis en évidence au niveau informatique, l’importance de saisir l’information au chevet du patient dans le respect de la logique des utilisateurs.
La direction d’un hôpital a vis-à-vis d’un SIH des attentes spécifiques (administratives, financières). Celles-ci sont totalement dépendantes des informations saisies au lit du malade ou dans les unités spécialisées (laboratoire, pharmacie). Pour une bonne saisie des données, tout SIH doit pouvoir s’adapter aux différents besoins spécifiques de chaque unité et leur apporter à chacune d’entre elles les informations qui leur sont utiles. L’informatique est un outil souple qui doit pouvoir s’adapter pour faire exactement ce dont vous avez besoin.
C’est dans ce contexte que le Dr Jean-Louis Bachy (ingénieur civil et médecin), responsable de l’informatique des soins intensifs (USI) aux Cliniques universitaires Saint-Luc (CUSL), créa en Belgique francophone le Groupe de Travail Informatique Clinique et de Recherche Appliquée aux Soins Intensifs (GTICRASI) qui regroupait 15 hôpitaux belges de Bruxelles et de Wallonie.
Ce groupe pionnier d’informaticiens, de médecins, intensivistes, anesthésistes, néonatologues, infirmiers... écrivit un cahier des charges reprenant les besoins informatiques dans une USI adulte ou pédiatrique. Le projet « QCARE » était et fut confié à une société extérieure. La première USI fut informatisée en 1994 aux CUSL.
Dans un souci de convivialité et d’évolutivité médicale, paramédicale et informatique, le système avait été conçu pour que les acteurs de terrain puissent adapter le système de manière simple et efficace. De cette façon, le paramétrage peut et reste continuellement adapté à la réalité du terrain, aux besoins administratifs, financiers et au système informatique.
Objectif : encoder de manière rapide, intuitive et avec maximum d’automatisation (AI). Le coordinateur informatique veille à ce que les applications collectent les informations nécessaires indispensables au financement de l’hôpital.
Conception de l’outil :
Une USI est une unité de soins d’hospitalisation où les professionnels de la santé surveillent en permanence des fonctions vitales instables. Cette surveillance était notifiée très fréquemment sur de grandes feuilles de suivi.
L’objectif premier était de pouvoir transposer informatiquement le contenu de de ce suivi. Le patient reste au centre du programme avec toutes les interconnexions possibles pour acquérir toutes les données nécessaires à l’évaluation de chaque fonction vitale (cardiaque, respiratoire, cérébrale, rénale, hépatique).
Une fois ces données collectées, nous affichons celles-ci de façon synthétique, en y ajoutant des calculs facilitant l’interprétation, les médicaments administrés influençant chaque fonction, et en affichant l’évolution de ces fonctions dans le temps. La grande feuille de suivi a pu être abandonnée !
Au niveau de la prescription du laboratoire (groupe d’analyses réalisées à l’admission), de la radiologie et de la pharmacie, une gestion spécifique est prévue dans le logiciel. La réalisation d’un connecteur est privilégiée vers les logiciels spécialisés qui ont leurs besoins propres. Notons que les pompes de médicaments ou appareils biotechniques sont connectés au système.
En médecine aiguë, nous portons une attention particulière à l’extrême précision de la balance hydrique/ionique qui permet de contrôler l’ensemble des entrées et sorties. Tous les utilisateurs ont œuvré pour améliorer le paramétrage de chaque ml de solution afin d’obtenir un bilan hydrique/ionique rigoureux. Ce calcul se réalise automatiquement et est une aide précieuse pour une prise en charge optimale du patient.
Selon l’expérience clinique, le logiciel s’est adapté à la réalité de terrain (paramétré par et avec les médecins) dans le respect des règles belgo-belges et internationales grâce à sa flexibilité et son système multilingue. Le langage international des diagnostics médicaux (ICD-SNOMED) ou infirmiers (NANDA) permet une extraction des données très simple, via un module spécifique, à des fins de comparaison ou à des fins de remboursement par la sécurité sociale.
Notons la différence entre une classification diagnostique (langage international) et une dénomination diagnostique au lit du malade, langage le plus précis possible, à des fins de traitement optimal du patient. Dans cette optique, le GTICRASI a prévu un lien entre le langage de terrain et la classification internationale.
Grâce au travail de qualité fait par les médecins (encodage précis des diagnostiques, prescriptions, adaptations...), les infirmiers (récolte des informations utiles), et tous les acteurs des soins intensifs : une prise en charge de qualité est assurée et la feuille de papier a été abandonnée !
En conclusion, le travail réalisé par les USI belges est reconnu internationalement. En plus d’une surveillance de paramètres, c’est un outil de gestion (médicaments, plans de soins) précis. La création du logiciel, sa flexibilité de paramétrage et son visuel univoque sont issus de la logique des utilisateurs principaux qui s’inscrit dans la vision hospitalière informatique actuelle...