Maintenant que nous parlons (enfin) des biosimilaires (P.Boudrez)

Depuis que l'Autorité belge de la Concurrence a annoncé le 8 octobre dernier qu'elle effectuait des perquisitions dans le cadre de pratiques qui freinent l'accès au marché pour les médicaments biosimiliaires, Belfius et KPMG ont également publié deux rapports soulignant la faible utilisation des médicaments biosimilaires.

Belfius a publié son étude annuelle MAHA, qui examine plus en détail la situation financière (précaire) des hôpitaux belges. Le rapport montre, entre autres, qu'en 2018, les hôpitaux ont généré un chiffre d'affaires lié aux produits pharmaceutiques supérieur de 10,7 % à celui de 2017, souvent la conséquence d'innovations de plus en plus coûteuses. Les bénéfices réalisés dans la pharmacie hospitalière contribuent à la santé financière de l'hôpital. C'est bien là que le bât blesse. Les hôpitaux sont incités en permanence à acheter plutôt des produits coûteux. Plus le médicament est cher, plus il est alors facile pour l'hôpital de négocier une marge financière avec le fabricant du médicament (souvent original). En Belgique, les hôpitaux sont autorisés à conserver la majeure partie de cette marge financière. Il n'est pas normal que les hôpitaux aient intérêt à acheter un médicament plus cher au lieu d’un médicament biosimilaire moins cher pour le même traitement. Un débat sur un financement sain et correct des hôpitaux est donc plus que jamais urgent.

Medicines for Europe, l'association européenne pour les médicaments accessibles, a également attiré l'attention sur le rapport de KPMG "Improving healthcare delivery in hospitals by optimized utilization of medicines". Ce rapport décrit en détail comment la politique d'achat dans les hôpitaux de 8 pays européens peut mieux contribuer à l'utilisation optimale des médicaments. Faut-il encore dire que les médicaments biosimilaires et génériques devraient pouvoir jouer un rôle clé à cet égard? Cependant, la Belgique semble être la dernière de la classe en ce qui concerne l'utilisation des médicaments génériques et biosimilaires dans les hôpitaux. Dans ces conditions, bien sûr, la dynamique des prix ne peut jouer un rôle suffisant.

Nous devons donc examiner de près la politique d'achat des hôpitaux et son impact sur l’argent public mis à disposition par l'INAMI. La manière dont les cahiers des charges sont élaborés favorise trop souvent les médicaments originaux. En outre, il faut encore beaucoup trop de temps avant que les appels d'offres publics ne soient lancés, même lorsque la concurrence est présente sur le marché depuis des mois ou des années. Peut-on raisonnablement considérer cela comme normal ?

Que l’on considère ceci surtout comme un appel à un débat fondamental avec, entre autres, le secteur hospitalier pour permettre aux médicaments biosimilaires (et par extension aux médicaments génériques) de jouer pleinement leur rôle sur le marché belge. Tout le monde en profitera, notamment les deniers publics et les patients. Les hôpitaux doivent bien sûr aussi pouvoir en bénéficier également.

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