Neuropédiatrie: à la croisée des spécialités (Dr Lieve Verstraete)

La neuropédiatrie n’est pas seulement le carrefour des neurologues et des pédiatres (les neuropédiatres sont formés dans les deux disciplines après 2 ans de formation supplémentaire après la spécialité de base), c’est une discipline résolument multidisciplinaire.

Des liens de collaboration étroits existent avec d’autres disciplines dont le dénominateur commun est le développement des enfants. Avec l’évolution rapide des connaissances sur l’étiologie de certaines affections et les nouvelles formes de traitement comme la thérapie enzymatique de substitution et la thérapie génique, nous sommes aussi à la croisée de la science et du clinique. Le tout au cœur d’une solide collaboration internationale.

Le domaine du neuropédiatre est vaste et recouvre les retards de développement généraux précurseurs d’une déficience intellectuelle, les troubles du langage ou du développement moteur, l’épilepsie, les céphalées… Les neuropédiatres jouent un rôle clé dans le dépistage, le diagnostic et le traitement précoces.

La concertation interdisciplinaire commence parfois dès la période prénatale, lorsque l’obstétricien soupçonne un problème de développement à la suite de l’échographie prénatale. Nous travaillons activement dans les unités néonatales intensives. Comme les prématurés présentent un risque accru de troubles du développement, ils sont systématiquement suivis dans un centre dédié où travaille aussi un neuropédiatre.

Parmi les syndromes «neurologiques» classiques comme l’épilepsie et les céphalées, les neuropédiatres occupent une place particulière en raison de leur expertise auprès des enfants. En effet, les épilepsies du nourrisson et de l’enfant sont distinctes des épilepsies de l’adulte, en termes de symptomatologie, d’étiologie et de traitement. Comme nous suivons le développement des enfants, nous sommes particulièrement attentifs à l’effet des médicaments sur les fonctions cognitives et le comportement. Ces éléments jouent donc un rôle important dans l’adaptation du traitement, parfois plus que le contrôle des crises proprement dit. Les options thérapeutiques sont larges: même chez les enfants, un stimulateur du nerf vague ou une chirurgie de l’épilepsie sont envisageables si l’épilepsie résiste à la thérapie. La migraine peut survenir très tôt dans l’enfance et se manifester autrement qu’à l’âge adulte mais, heureusement, elle n’est souvent pas permanente.

Diagnostic génétique
Grâce à l’évolution rapide de la génétique, nous pouvons établir un diagnostic génétique pour bien plus de cas qu’autrefois, par exemple pour les déficiences intellectuelles ou l’épilepsie grave. Ce diagnostic plus rapide permet aux parents d’avoir une idée claire de l’évolution, de consulter eux-mêmes des informations et de rencontrer d’autres personnes dans la même situation. Les diagnostics indiquent aussi les risques de récidive en cas de nouvelle grossesse. Cette connaissance change l’avenir des jeunes familles concernées.

Les thérapies génique et enzymatique de substitution ont radicalement changé le traitement des maladies musculaires et métaboliques. Autrefois, on préconisait principalement une thérapie de soutien, mais aujourd’hui nous visons la guérison de certaines maladies. L’amyotrophie spinale fait partie du dépistage néonatal des maladies rares traitables.

Dans les centres spécialisés pour traiter les infirmités motrices cérébrales, les troubles neuromusculaires, le spina bifida ou les maladies métaboliques héréditaires, les neuropédiatres occupent une place importante et collaborent intensivement avec de nombreux médecins: orthopédistes, neurochirurgiens, urologues, gastro-entérologues; mais aussi des paramédicaux: kinésithérapeutes, ergothérapeutes, logopèdes, psychologues, travailleurs sociaux, diététiciens...

Bon nombre de concertations ont lieu extra muros, notamment avec les services d’orientation précoce et à domicile, les PSE, les services sociaux...

À l’hôpital pour enfants, nous apportons les soins des méningites, encéphalites, tumeurs cérébrales ou traumatismes crâniens.

Le TDAH nous lie aux pédopsychiatres, mais l’autisme, les problèmes émotionnels et les troubles du comportement induits par le contexte relèvent strictement de la pédopsychiatrie.

Collaboration harmonieuse
Non seulement notre travail est multidisciplinaire mais nos réseaux sont aussi excellents et la collaboration est harmonieuse entre les hôpitaux régionaux et universitaires, et entre les collègues flamands et francophones, lors des symposiums semestriels communs. Nous sommes pionniers dans la collaboration internationale et très actifs à la European Paediatric Neurology Society (EPNS), à la Société européenne de neurologie pédiatrique (SENP) et au sein d’EpiCare (European Reference Network on Epilepsies).

À la croisée de la science et du clinique, entre plusieurs disciplines, au sein d’une collaboration régionale, universitaire ou internationale, les neuropédiatres se sentent dans leur élément.

  • Secrétaire de l’Union professionnelle belge des médecins spécialistes en neurologie pédiatrique.

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