Frank Vandenbroucke : "Cette réforme est existentielle pour les médecins".

Lors du symposium du GBS du 4 février consacré à la réforme de la nomenclature et de l’organisation des soins, le ministre de la Santé publique a souligné à plusieurs reprises que cette réforme est existentielle pour les médecins. 

Il a immédiatement relativisé la « caricature » faite par le Dr Jean-Luc Demeere, président du GBS,  qui avait d’ailleurs admis lui-même en préambule qu'avec sa présentation de la nouvelle organisation de la première ligne, il voulait seulement attiser le débat. 

"Je suis d'accord à 90 % avec les commentaires du Dr Devos, mais pour l'amour de Dieu, n'intégrez pas l'ancienneté dans la réforme. Cela poserait des problèmes sur le marché du travail ", a insisté Frank Vandenbroucke.

"Nous devons vraiment achever cette réforme. Lorsque j'ai mené il y a 20 ans la révision de la nomenclature en tant que ministre, elle n'était même plus originale. Maintenant, depuis que je suis de retour aux affaires, j'ai l'impression d'assister à une réunion d'il y a 20 ans. Pratiquement aucun progrès n'a été réalisé.  Il reste encore 23 mois pour mener à bien ce projet et le préparer pour qu’il soit prêt à être mis en œuvre. Si cela ne fonctionne pas, nous aurons besoin au moins d’une décennie pour y parvenir."

Quatre objectifs

Le ministre Vandenbroucke a mis en avant quatre objectifs pour sa réforme : 

  • d'une part, technique (la "nouvelle grammaire" des prestations et de leurs descriptions) et d'autre part, économique;

  • déterminer la différence entre la partie médicale professionnelle et le coût d’une prestation médicale qui doit être réalisée. Fixer en quelque sorte des honoraires purs;

  • légitimer la rémunération de prestations justifiables ;

  • préciser l'objectif "transversal", c'est-à-dire traduire la nomenclature par une vision particulière des soins aux patients. Dans lequel on prend en compte un certain nombre de faits tels que l'augmentation des maladies chroniques et le vieillissement de la population, le phénomène de la multidisciplinarité - qui nécessite plus de temps pour le contact avec les patients - et d’autres évolutions.

La recherche sur la valorisation du temps que vous consacrez à votre patient - à l'origine, une tâche destinée à l’UGent - a été transférée à un groupe de travail dirigé par Jo De Cock (Inami) et réunissant toutes les personnes directement concernées. 

Entre-temps, un appel du GBS à contribuer à ce projet a été lancé. Ceux qui ont participé au symposium ont été invités à le faire. Ils auront dix jours pour répondre, a déclaré Donald Claeys, secrétaire général du GBS lors du colloque.

"Et cela doit être rapide", a poursuivi le ministre Vandenbroucke, "car ce groupe de travail doit être prêt avec une première note d'orientation pour la fin du mois de mars. 

Les points de travail sont les descriptifs actuels pour mieux soutenir la consultation en fonction du temps, de la complexité et de la sévérité d'une pathologie. La deuxième tâche du groupe de travail est d'identifier les lacunes. Le troisième objectif est de s'orienter également vers une échelle de valeur relative pour ce sujet. En outre, ce document esttransversal. Il concerne non seulement les spécialistes mais aussi les généralistes."

L'observateur attentif notera qu'à la fin du mois de mars, le groupe de travail Van den Bruel/Belche devrait également être prêt avec sa note sur la réforme de la médecine générale. Il y a en effet des parallèles, bien que les deux groupes de travail ne soient pas entièrement comparables : ce dernier groupe de travail élabore plutôt un modèle de recours, a précisé le ministre. 

Frank Vandenbroucke s’est ensuite référé à l'étude réalisée par Möbius qui devrait finalement former avec toutes ces initiatives un ensemble cohérent (NDLR : les aspects de la réforme pour la biologie clinique, l’anatomopathologie,  l’oncologie-radiothérapie et la génétique).

Le voile de l'ignorance est le point de départ

Le ministre a souligné l'état d'esprit avec lequel cette tâche titanesque doit être accomplie.

Ainsi, selon lui, c’est un exercice existentiel pour le corps médical. Il a préféré utiliser la méthode développée par le philosophe politique américain John Rawls (Université de Harvard) . "Si vous réfléchir à la structure essentielle d'une société, les parties concernées doivent le faire sous le voile de l'ignorance, tel était son postulat. Ils doivent d'abord le faire en dehors de ‘l'intérêt immédiat’. Ne faisons pas immédiatement nos comptes en euros et celle de notre propre profession", a-t-il insisté. "Réfléchissons d'abord objectivement à une évaluation relative et regardons seulement après l'aspect financier."

S'adressant explicitement à Philippe Devos, le ministre Vandenbroucke a déclaré ce qui suit : "Créer des marges, d'accord, mais jouez là aussi le jeu de John Rawls : mettez-vous à la place du ministre et du patient. Notre budget consacré aux honoraires médicaux est passé de 8 milliards en 2019 à 11,2 milliards en 2022 ! Nous devons savoir ce que nous faisons. Les hôpitaux sont dans une position difficile, d'où le ballon d'oxygène de 262 millions que j'ai libéré en plus du budget normal qui a été augmenté. Pendant ce temps, six chantiers sont ouverts pour le secteur hospitalier, dans lesquels nous voulons avancer de façon opérationnelle dans le même état d’esprit."

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Derniers commentaires

  • Marc Horion

    07 février 2023

    En direction vers la médecine anglo-saxonne, le NHS est une catastrophe, les USA dépensent une fortune par habitant en soins de santé… . Tout “gratuit” sans responsabilisation des gens. Mais bon, … si l’on commençait par la base, … l’éducation par exemple… désolé, j’avais oublié le “pacte d’excellence “… électoralisme, électoralisme… quand tu nous tiens… . Au fait, ce ministre plus blanc que blanc, n’a-t-il pas un passé de pyromane?.

  • Francois Planchon

    06 février 2023

    Résumons : il veut réfléchir sans préjugés pour optimiser les structures essentielles de notre société...
    OK, mais alors optimisons prioritairement la gouvernance de notre pays : notre ville chinoise de 11,5 millions de citoyens, elle se gérerait bien plus efficacement, et pour 4 fois moins cher en prime, avec 15 ministères et une chambre de 100 députés !!!
    Et cela aurait le mérite de dégager des moyens pour baisser les impôts, et consacrer plus de moyens aux services au public... Trop simple ? Trop évident ?

  • Alexandre Sarafidis

    06 février 2023

    Cette réforme est essentielle pour le ministre .
    Comme l’évoque le Dr François , le système Belge fin ne ait satisfaction aux patients .
    Au fur et à mesure des réformes ministérielles , la dégradation est apparue pour les médecins et ke soignants .
    Le seul but du ministre semble s’être la gestion du budget et essellement au détriments des Médecins .

  • Erik FRANCOIS

    06 février 2023

    Quelqu'un veut vous vendre quelque chose:
    "Vite! il faut faire vite!"
    "C'est votre dernière chance!"
    "C'est pour votre bien."
    "J'aimerais vous expliquer mais c'est très compliqué..."

    Tous les signes rouges habituels d'une arnaque.

    La Belgique a, encore, un système de soins bien supérieur au Royaume Uni, à la France, aux Pays Bays et aux USA (je ne connais pas les autres). Ne le laissons plus dégrader par une complexification croissante et la maladie du micromanagement. Il y a peut-être des ajustements à réaliser, mais qui peut croire que cela ne se fera pas, sous ce ministre, de façon toxique pour les médecins?