“Les psychiatres se révoltent contre les décisions unilatérales de certaines mutuelles”

2 euros par jour par patient, tel est le montant octroyé par l'INAMI au psychiatre qui travaille en MSP (Maison de Soins Psychiatriques). Mais pour les mutuelles, c'est encore trop... dénonce l'ABSyM dans un communiqué.

Depuis quelques mois, 3 mutuelles, dans ce cas-ci chrétiennes, libres et neutres, refusent de prendre en charge les consultations psychiatriques ambulatoires des patients placés en MSP, sous prétexte d'un cumul des prestations avec le psychiatre travaillant dans la MSP.  "Pire encore, elles demandent au psychiatre extérieur de rembourser les sommes perçues tout en refusant de payer les MSP! " s'insurge Caroline Depuydt , psychiatre et administratrice à l'ABSyM.

"Vous pourriez vous dire qu'il s'agit là d'une petite spécificité psychiatrique qui ne vous concerne pas et passer à l'article suivant de votre journal... Mais je vous en prie, continuez à lire, je pense que cela impacte potentiellement tout le corps médical." poursuit-elle.

En effet, quelle jurisprudence cela pourrait-il installer dans les rapports mutuelles/prestataires de soins? Certaines mutuelles décident de façon unilatérale, sans concertation et sans préavis, de modifier leur règle interprétative sur un code de nomenclature. Elles ne passent par aucune des voies de concertation possibles avec l'INAMI ou avec les médecins, que ce soit la Commission nationale médico-mutualiste ou le Conseil technique médical, qui a pourtant dans ses fonctions la formulation des règles interprétatives de la nomenclature. "Si nous laissons faire, dans quel engrenage mettons-nous le doigt?"s'interroge Marc Moens, Président de l'ABSyM.

45 333 euros bruts par an
2 euros/jour/patient, cela veut dire 45 333 euros bruts par an pour s'occuper de 60 patients... Après 12 ans de formation... Cela comprend la supervision de l'équipe, les préadmissions, l'évaluation des traitements, la participation aux réunions cliniques et le suivi de patients qui souffrent de pathologies psychiatriques chroniques tellement impactantes qu'elles empêchent le maintien de l'autonomie.

Pour le syndicat des médecins, il semble donc parfaitement logique, dans ce contexte, que le patient qui arrive en MSP ait un psychiatre traitant ambulatoire qui permette de renforcer la stabilité psychique. Cela apporte un espace individualisé de soins et d'écoute au patient tout en diminuant les risques de crise et de réhospitalisation en aigu.  D'autant que le psychiatre traitant est souvent préexistant à l'arrivée dans la MSP et a établi un lien thérapeutique de longue date précieux avec son patient.

Pour Caroline Depuydt, interdire ce lien, purement et simplement, est une grave entrave à la liberté de choix thérapeutique. Qui plus est, c'est un mauvais calcul; il y a fort à parier que la rupture de cette alliance thérapeutique mènera à des décompensations psychiatriques aiguës et sera finalement contre-productive.

"Par ailleurs, comment peut-on prétendre demander à un psychiatre en MSP de remplir toutes les missions décrites plus haut, de rajouter celle d'un suivi psychiatrique adéquat, pour un montant aussi dérisoire?" s'interroge t-elle  "Qu'est-ce que cela veut dire de la considération qu'ont les mutuelles pour le médecin en général et le psychiatre en particulier?" " Et la considération pour le droit au patient d'un libre choix de son médecin et d'un soin de qualité?"

Nul doute que les réactions ne vont tarder à  se manifester.

La décision de ces mutuelles est extrêmement inquiétante. Il nous semble que l'INAMI doit prendre ses responsabilités et nous demandons à cet égard le respect de ce qui s'est toujours fait jusqu'à présent: la possibilité pour le patient en MSP d'aller voir son psychiatre traitant en ambulatoire. À terme, par ailleurs, une revalorisation du travail du psychiatre en MSP devrait également être une priorité!

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