Quotas inami, renouer le dialogue et dépasser nos clivages (Dr C.Depuydt)

Ne pas faire de ce dossier un argument électoral communautaire, tel est le souhait. Chacun reprend ses arguments massues, et fait dire aux chiffres ce qu'il veut.

1140 étudiants pour 510 places : pour certains, c'est une bonne évaluation, pour d'autres, c'est risquer un surplus d'étudiants en fin de cursus. L'ombre communautaire plane également sur ce dossier : il se dit que la Flandre organise un examen d'entrée depuis 1997 et obéit aux consignes fédérales, la fédération Wallonie-Bruxelles n'en finit pas de n'en faire qu'à sa tête...

Chacun se renvoie la responsabilité, le dossier s'enfonce dans l'immobilisme. Mais qui trinque à la fin?

Mission impossible 

Organiser un filtre aux études de médecine qui soit en même temps intelligent, qualitatif, basé sur des données dynamiques et adaptables, qui n'organise pas de pénurie dans une partie du pays : mission impossible?

Filtre, parce que le métier de médecin reste attractif, ouvrir en grand les vannes verrait un afflux de jeunes s'inscrire en première année (aux derniers examens d'entrée : 10000 inscrits).

Les accueillir, les former serait impraticable tant en terme de coût que de qualité. Sans compter leur arrivée après sur un marché du travail qui risquerait alors de se saturer.

Intelligent, parce que tester l'empathie de jeunes de 18 ans par des QCM, c'est probablement facile à corriger mais peu productif en terme de prédictivité.
Qualitatif, parce qu'un médecin c'est avant tout un être humain, qui fait ce métier par vocation, qui aura à développer toutes ses capacités de communication et d'empathie, en plus des savoirs techniques. Qualitatif aussi parce que c'est devenu un fil rouge de la profession, qu'il faut avoir en tête dès le début: qualité des soins, de vie des médecins, de prise en charge des patients.

Le cadastre doit pouvoir s'adapter

Données dynamiques et adaptables, parce que le paysage médical est mouvant et en pleine évolution. On l'a déjà dit 10.000 fois : féminisation, temps partiels,etc. Mais aussi, réorientation de carrière (de plus en plus nombreuses), développement de l'IA qui prendra peut-être la place de certaines sous-spécialités (radiologie). Le cadastre doit pouvoir s'adapter à ces phénomènes et rectifier le tir, à la hausse ou à la baisse, et ce sans délai. En effet, former un médecin prend au-moins 9 ans, il faut donc pouvoir anticiper.

Ne pas organiser de pénurie, parce qu'il s'agit d'avoir le nombre juste de médecins et à leur juste place. Augmenter la formation de médecins généralistes mais qu'ils s'installent tous dans le centre des grandes villes n'aidera en aucune manière les zones en pénurie par exemple. Il y a là aussi un effort à fournir, pour soutenir l'installation dans ces zones, en promouvant les pratiques de groupe par exemple (fournir une aide logistique, un secrétariat) dont sont demandeurs les jeunes médecins qui sortent.

Bref, il y a des idées qui non seulement amélioreraient les études mais également, ensuite, la pratique. Cela demande juste que l'on dépasse nos clivages et que l'on se mette autour de la table. Qu'attend-on?

Lire aussi : 

Sans filtre efficace plus de numéros INAMI surnuméraires pour les francophones (De Block)

L'Inami de retour pour de mauvais tours (Giovanni Briganti)

Etudes de médecine - L'Absym demande de revoir le système d'examen d'entrée

Etudes de médecine - "Pas question de laisser les 1.100 étudiants actuels sans numéro Inami" (Alda Greoli)

Numéros Inami - Une conférence interministérielle extraordinaire le 11 février

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Derniers commentaires

  • Pierre CHAPELLE

    02 février 2019

    L'avis du Dr Depuydt est d'une grande sagesse et la majorité des médecins y adhèrent certainement. Le faire connaitre aux politiciens avec l'appui de nos différentes associations professionnelle serait peut-être utile. Il est dommage que les responsables à Bruxelles et en Wallonie ne soient pas médecins et ne prennent pas assez leurs avis.L'espoir fait vivre! Et il en reste chez le Dr.Pierre Chapelle,pédiatre, malgré son âge!

  • Christian BROHET

    01 février 2019

    Enfin, une réflexion approfondie et empreinte d'intelligence qui tranche avec les sempiternelles querelles partisanes concernant cette question des quotas INAMI.

    Bravo, et merci Dr Depuydt!

    Dr Christian Brohet, Prof. émérite UCLouvain