Les réseaux sont utiles, mais l’incertitude l’emporte

Aujourd’hui, pour les médecins, lorsqu’on évoque avec eux la création des réseaux, la précarité de l’emploi, la perte de revenus et la perte d’autonomie au travail sont leurs principales préoccupations.

«Je les comprends, mais ce n’est pas la faute des réseaux. Guidelines, trajet de soins... les différentes et récentes harmonisations des pratiques cadrent de plus en plus la pratique des médecins. C’est une évolution du métier dont les réseaux ne sont pas responsables», explique Pascal Mertens, directeur général du CHR Sambre et Meuse.

Précarité du travail

A la lecture de l’enquête, il ressort aussi qu’une légère majorité (58%) craignent la précarité de leur travail: (62,5%) chez les jeunes médecins et surtout les néerlandophones (64,6%) (Question 1). «Cela me sidère. Il manque tellement de médecins aujourd’hui qu’il n’y a pas de risque pour leur emploi», s’étonne le Dr Benoît Debande, médecin, directeur général des centres hospitaliers de Jolimont. De son côté, Pascal Mertens rappelle que «l’expérience des premiers réseaux montre que cela ne provoque pas de pertes d’emplois. Il y aura toujours autant de patients à traiter

Au fil de l’enquête, les médecins évoquent aussi une possible perte de revenus (51% FR, 54% NL) (Question 2). «Ce ne sont pas les réseaux qui provoquent des pertes de revenus mais plutôt les normes de financement qui pourraient le faire», nuance Pascal Mertens.

Quelle qualité de travail?

Dans ce travail en réseau, la multiplication des sites les inquiètent: près de huit médecins sur dix (!) (Question 3) craignent de perdre du temps. Les femmes médecins en particulier y sont sensibles (82,1%). Quatre personnes interrogées sur 10 estiment même que leur équilibre entre vie professionnelle et vie privée se détériorera. Un sentiment très commun à tous les sous-groupes (hommes, femmes, jeunes, personnes âgées).

Pour Benoît Debande, cela va dépendre de l’organisation du réseau: «Nous avons l’habitude de travailler en gestion multisites chez nous. Pour éviter les baisses de productivité et de qualité de travail pour les médecins, nous avons prévu des rotations par semaine ou par mois. On évite donc les déplacements en journée. De plus, notre expérience montre qu’il ne faut pas mettre un médecin sur plus de deux sites. C’est trop. Il faudra en tenir compte dans le travail en réseaux». Un avis partagé par Pascal Mertens: «La spécialisation des sites devrait aussi éviter la multiplication des déplacements».

Au fil du questionnaire, on découvre avec effroi que 78% des médecins craignent de perdre leur autonomie (Question 4). Par ailleurs, six médecins sur dix pensent qu’ils auront moins leur mot à dire. «Cette interrogation sur leur perte d’autonomie est légitime mais elle est surestimée sans doute parce qu’ils ne savent pas ce qu’il se passe», ajoute Julien Compère. Pour le Dr Philippe Devos, président du Conseil médical du CHC de Liège, le médecin restera un acteur majeur: «La gouvernance des réseaux donnera plus de pouvoir au conseils médicaux donc, il y aura à priori plus de garantie pour les médecins». Sans doute les médecins ne connaissent-ils pas cet aspect de la réforme...

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Les résultats de cette enquête sont le fruit d’une collaboration entre Le Spécialiste et Zorgnet-Icuro. Sous le titre «Réseaux hospitaliers: menace ou opportunité pour le médecin hospitalier?», ils s’inscrivent dans le cadre du mémoire de Hilde Van Kerckhoven pour l’obtention d’une maîtrise en gestion et politique de la santé. Superviseur: Pr Dominique Vandijck (Faculté de Médecine et des Sciences de la Santé, UGent). 836 médecins néerlandais (63,3%) et francophones (36,4%) ont répondu au questionnaire de mars à juin 2018. L’échantillon était composé de 35% de femmes et de 65% d’hommes répartis de manière égale dans toutes les catégories d’âge.

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