Soins palliatifs pédiatriques : une approche encore trop marginale en Belgique

Les soins palliatifs pédiatriques (SPP) demeurent en Belgique une réalité discrète, parfois invisible, malgré les besoins spécifiques et croissants des enfants atteints de maladies graves. Dans un récent rapport , la Fondation Roi Baudouin dresse un état des lieux préoccupant et avance cinq priorités pour améliorer l’accès et la qualité de ces soins. Médecins, infirmiers, décideurs : tous sont appelés à sortir ces soins « de l’ombre ».

Les SPP concernent une population restreinte mais très hétérogène : enfants atteints de cancers, de maladies neurologiques dégénératives ou métaboliques, nouveau-nés gravement malades, adolescents en fin de vie. Selon l’étude, seuls 384 enfants (1,7 %) sur plus de 22 500 hospitalisés à Bruxelles entre 2010 et 2014 ont été pris en charge par une équipe de liaison. « Beaucoup associent encore ‘palliatif’ à la mort imminente. Il y a une confusion entre soins palliatifs et soins de fin de vie », déplore une pédiatre d’une équipe de liaison.

Une approche transversale encore marginale

Les soins palliatifs en pédiatrie ne sont pas réservés aux spécialistes. Le modèle belge repose sur une logique à trois niveaux : sensibilisation de tous les soignants, compétences de base en pédiatrie et équipes spécialisées. Sept équipes de liaison pédiatriques reconnues assurent aujourd’hui cette mission sur tout le territoire. Elles interviennent tant à l’hôpital qu’au domicile, souvent sans les moyens nécessaires. « Le terme ‘liaison’ traduit bien notre position hybride entre l’hôpital et la maison », explique un membre de l’équipe Globul’home à Bruxelles. En Wallonie, les équipes actives au CHR-CHU de la Citadelle et au CHC MontLégia remplissent ce rôle, avec la même exigence, mais un financement public insuffisant, limité au niveau fédéral, sans soutien régional.

Des obstacles systémiques persistants

Outre le manque de reconnaissance, les SPP pâtissent d’un cadre réglementaire inadapté. Le « statut palliatif » repose sur une espérance de vie de trois mois, un critère difficilement applicable à des trajectoires longues et imprévisibles. Une étude belge montre que la durée moyenne de prise en charge atteint 7 ans, avec des cas dépassant 12 ans. Par ailleurs, les soins infirmiers à domicile ne sont pas couverts par une nomenclature spécifique pour les enfants, ce qui oblige infirmiers et médecins à travailler partiellement bénévolement. « C’est fou, mais c’est la vérité », témoigne une infirmière wallonne.

Former, informer, coordonner

La Fondation met en évidence cinq priorités urgentes : améliorer la communication, renforcer la formation, garantir un accès équitable, encourager la recherche et mieux accompagner les fratries. Le rôle du généraliste, encore trop marginal, doit être revalorisé, alors qu’il est souvent absent du parcours pédiatrique en milieu urbain, y compris à Bruxelles et en Wallonie. Certains projets francophones commencent toutefois à inverser la tendance : l’Étoile des enfants, active dans le Hainaut et le Brabant wallon, propose une prise en charge globale et holistique, articulée avec les équipes de liaison hospitalières. À Bruxelles, Arémis a constitué une équipe formée aux SPP. Ces expériences montrent qu’une première ligne bien outillée peut renforcer considérablement la qualité du parcours de soins.

Un enjeu humain et politique

« Les soins palliatifs, ce n’est pas quelque chose de gris ou de noir », témoigne une onco-hématologue pédiatrique. « C’est remettre du sel à la vie, c’est colorer tous les moments. » Pour la Fondation Roi Baudouin, il est temps que les SPP soient reconnus comme un pan à part entière des soins, et non comme une extension des soins palliatifs adultes. Le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE) devait entamer en avril 2025 une évaluation scientifique de leur organisation. En attendant, ce rapport veut « provoquer une prise de conscience collective ».

> Découvrir l'intégralité du rapport

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