Incidents médicaux: proposition pour un nouveau système de notification (Dr M. Bafort)

Le Dr Michel Bafort, gynécologue à l’AZ Alma à Eeklo, propose d’instituer un "Conseil Supérieur pour la Sécurité des Actes Médicaux" afin d’abaisser le nombre des erreurs médicales. Un nouveau modèle de concertation entre directions, médecins, soignants et organisations de patients au sein des hôpitaux pourrait en effet déboucher sur un changement de culture salutaire.

«Les ‘erreurs médicales évitables’ sont responsables de plus d’accidents mortels que la circulation. En moyenne, un patient peut s’attendre à une ou deux erreurs de médication au cours d’une hospitalisation, et des études ont aussi démontré qu’un médecin au sommet de son art ne dépasse pas 70% de diagnostics corrects.»

«Un nouveau modèle de concertation (‘corporate governance’) entre directions, médecins, soignants et organisations de patients au sein des hôpitaux devrait déboucher sur un véritable changement de culture placant la collaboration au centre des préoccupations.»

«La communication devrait par ailleurs être réexaminée au départ du constat que les médecins et autres prestataires de soins sont actuellement inondés d’une masse de circulaires qu’aucun individu normalement constitué ne serait en mesure de parcourir intégralement.»

«Les formations CRM (Crew Resource Management) devraient être une évidence dans tout service critique.»

Un nouveau modèle de gestion des incidents médicaux
Il est aujourd’hui nécessaire d’élaborer un nouveau modèle pour la gestion des incidents médicaux, basé sur une dépénalisation des (quasi) incidents signalés dans des délais limités à un système de notification sécurisé encore à créer, pour autant qu’ils ne soient pas intentionnels.

Cette notification se ferait à l’échelon de l’établissement et du réseau et déboucherait sur des cycles d’amélioration organisés à chaque niveau et placés sous la supervision d’un "Conseil Supérieur pour la Sécurité des Actes Médicaux" qui pourrait/devrait également, si nécessaire, se charger d’anonymiser l’information. Des travaux législatifs seraient nécessaires pour protéger ce circuit de notification de toute saisie juridique. Le Conseil Supérieur devrait se composer de magistrats et de médecins (experts).

La dépénalisation de la notification d’incidents dans le cadre d’un futur "Conseil Supérieur pour la Sécurité des Actes Médicaux" ne portera pas atteinte aux droits du patient tels qu’ils existent à l’heure actuelle. Il pourra en effet encore et toujours, le cas échéant, s’adresser au fonds des accidents médicaux (FAM) ou au tribunal pour obtenir un dédommagement.

Les données du système de notification sécurisé évoqué plus haut ne devraient toutefois en aucun cas pouvoir être utilisées devant un tribunal civil ou auprès du FAM. "Je m’interroge par ailleurs sur l’opportunité de maintenir le volet pénal des jugements concernant les erreurs médicales non intentionnelles (qui n’existe d’ailleurs pas aux États-Unis)."

Win-win
Ce nouveau système de notification des incidents pourrait présenter une foule d’avantage. Des exemples en provenance des États-Unis (p.ex. celui du Virginia Mason Health System à Seattle) montrent qu’il permet d’abaisser de façon radicale (jusqu’à -74%) le nombre d’erreurs médicales et, dans la foulée, le montant des primes d’assurance.

Il va sans dire que ce sont avant tout les patients qui en retireraient un bénéfice (moins de complications et de réadmissions), mais l’Inami aussi aurait tout à y gagner, pour les mêmes raisons. Les médecins et hôpitaux, eux, verraient diminuer leurs primes d’assurance et devraient moins souvent se défendre devant les tribunaux, ce qui allègerait du même coup la pression psychologique qui pèse sur les médecins et autres prestataires de soins (avec à la clé un recul des burnouts, dépressions et suicides).

Un système de notification sécurisé ne présente donc que des avantages et génèrerait même des économies.

On pourrait encourager les médecins à y participer sur une base volontaire en leur proposant une prime d’assurance réduite et un bonus de l’Inami.

Qu’attendons-nous?

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